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La magie de Piatti

Piatti scarf

L’Impact de Montréal s’entraînait à l’Estadio Hidalgo de Pachuca qu’à un certain moment, au cours d’un exercice sur une moitié de terrain, Ignacio Piatti a confirmé qu’il était à 100 %.


Avec sa première touche de balle à la réception d’une passe près du but à défendre, Piatti a lobé un défenseur. Poursuivant le ballon, il est arrivé à le maîtriser et l’a soulevé par-dessus un autre adversaire. Surpris par la sortie du gardien, Piatti s’est tourné de côté, a fait rouler le ballon derrière lui-même, a poursuivi le mouvement et a décoché une frappe dans la lucarne, au second poteau.


Au début du camp d’entraînement, l’entraîneur Frank Klopas avait affirmé que Piatti « pourrait » jouer dans le deuxième match de la série quart de finale de la Ligue des champions de la CONCACAF; Piatti était passé sous le bistouri en novembre dernier en raison d’une tendinite au genou gauche. S’il restait des doutes, ils se sont dissipés sur la pelouse du Hidalgo.


Seul Joueur désigné de l’Impact depuis la retraite de Marco Di Vaio, Piatti a de lourdes charges sur les épaules. Les attentes sont aussi élevées cette année que l’an dernier.


« J’ai montré comment je pouvais jouer l’an dernier, a rappelé Piatti en entrevue à MLSsoccer.com la semaine dernière, quelques heures avant cette séance d’entraînement. J’essaierai de faire de même, pour l’équipe. Après la blessure, je ne pouvais plus jouer, mais cette année, j’espère jouer tous les matchs, marquer des buts et aider l’équipe à aller aussi loin que possible. »


Jusqu’ici, tout va pour le mieux. Piatti a pu jouer 90 minutes le lendemain dans le verdict nul de 2-2 entre Montréal et Pachuca, ce qui a dû soulager les partisans montréalais autant que le résultat.


Il a réalisé certaines manœuvres dont les Montréalais avaient grande envie en fin de saison dernière, lorsqu’il n’y avait plus d’enjeu que de découvrir qui était Nacho Piatti. Le nouveau Joueur désigné avait intégré la MLS à vitesse grand V avec quatre buts et une passe décisive en six matchs.


Mais la tendinite a eu raison de lui le 20 septembre. Piatti est resté au sol, et Pablo Pintos, joueur de San Jose, a fait signe au banc de l’Impact. C’était la dernière fois qu’on voyait Piatti sur le terrain cette saison-là.


« J’ai tout tenté pour jouer ces derniers matchs, s’est rappelé Piatti. Je suis venu ici pour jouer. Je voulais jouer le dernier match de Marco. Mais j’aurais joué 35, 45 minutes et j’aurais dû sortir à cause de la tendinite. Mais j’étais encore dans le vestiaire à encourager l’équipe. Maintenant, grâce à Dieu, ça va. »


Piatti a suivi le rythme de l’équipe au cours de la préparation, grâce aussi à son « excellent médecin en Argentine », et il semble prêt à reprendre le travail là où il l’avait laissé en MLS – après avoir enfin pu y faire ses débuts.


L’Impact a embauché Piatti le 2 juillet de l’an dernier, mais l’attente a été longue. Le club avait laissé Piatti finir sa Copa Libertadores avec San Lorenzo, ce qui avait convaincu Piatti de se joindre à l’équipe. Au bout du compte, les règlements sur les transferts ont exclu Piatti du second match de la finale de la Libertadores, que San Lorenzo a malgré tout gagnée 2-1 au total des buts contre Nacional, du Paraguay.


« L’Impact m’a approché il y a deux ans, a raconté Piatti. J’avais refusé parce que je voulais jouer la Libertadores. L’année suivante, j’étais en Libertadores, et ils sont revenus à la charge. Le président [Joey Saputo] m’a dit que je pourrais jouer les derniers matchs du tournoi, la demi-finale et la finale. Ça m’a beaucoup plu. C’étaient des matchs importants. Lorsque je suis arrivé à Montréal, j’étais très heureux aussi. J’ai pu jouer avec Marco Di Vaio, Matteo Ferrari, Andres Romero, j’ai reçu un accueil très chaleureux. »


Et son départ a été souligné en grande pompe à San Lorenzo. Joueur marquant de la Libertadores gagnée par San Lorenzo, Piatti était un favori des partisans d’El Ciclón, le dernier d’une longue liste de clubs pour lesquels il s’est aligné avant la MLS.


Tout a commencé dans son village de General Baldissera, dans la province argentine de Córdoba, où il est né le 4 février 1985. Il a commencé à y jouer chaque jour avec ses amis, toujours dans un rôle offensif.


« J’ai rejoint un club d’où je viens, Mitre de General Baldissera. J’ai commencé à y jouer quand j’étais jeune. Ensuite, il y a eu ce qu’on appelle un Mundialito, où des clubs de partout en Argentine vont jouer. Un de ces clubs s’appelait Talleres et était situé à Córdoba. Ils m’ont vu, et je suis allé faire un essai. J’avais 14 ans. Je suis resté là deux mois, puis je suis parti à Newell’s, à Rosario, pour un an. »


Piatti s’est ensuite rendu à Rome, en Italie, en 2002; son idole de jeunesse, Gabriel Batistuta, lui avait trouvé un essai à l’AS Roma. L’année suivante, Piatti est allé à Galatasaray, en Turquie. L’année d’après, à Nice, en France. Toujours en essai, à la poursuite d’un rêve.


« Après Nice, j’avais 18 ans, et quand ils m’ont dit que je ne resterais pas là, je suis allé faire un essai à Chacarita. Je me suis dit que j’allais faire l’essai et que, si ça ne fonctionnait pas, je retournerais à mon village. J’ai fait l’essai à Chacarita. Ils étaient alors en deuxième division. Je suis resté jouer avec leur équipe de quatrième division, puis après six mois, je suis monté en équipe première. C’est comme ça que ma carrière a commencé. »


Piatti a ensuite passé l’année 2006 à Saint-Étienne, où l’adaptation a été, de son propre aveu, difficile. Dribleur invétéré, Piatti a vite compris qu’en France, « on jouait à une ou deux touches ».


Monté sur le terrain une seule fois en Ligue 1 au cours de son séjour, Piatti est retourné en Argentine, à Gimnasia La Plata. C’est là qu’il a joué pour la première fois contre le club de son cœur lorsqu’il était petit, Boca Juniors. Il n’a pas débordé d’émotions.


« J’avais déjà joué à Chacarita, qui jouait en deuxième division et qui n’affrontait donc pas Boca, et en France. Lorsque j’ai joué contre Boca, c’était bien, le stade était superbe, mais je n’étais plus partisan de Boca, a reconnu Piatti. J’étais partisan du club pour lequel je jouais. »


Piatti est plus tard devenu partisan de Lecce, en Italie, où il a joué sous les ordres de quatre entraîneurs en deux ans. Après la seconde saison, qu’il a surtout passée sur le banc, Piatti est retourné en Argentine, encore. Avec San Lorenzo, il a remporté le Torneo Inicial en 2013 et, surtout, obtenu le droit de disputer la Copa Libertadores 2014.


Ce triomphe en Libertadores était le premier de San Lorenzo. Les Montréalais visent leur premier triomphe en Ligue des champions. S’ils veulent atteindre leur but, ils auront besoin de bien des choses, dont la magie de Piatti. Celle qu’il a pratiquée à l’entraînement au Hidalgo.